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  • Photo du rédacteurAlain SUPPINI

MON MEILLEUR MÉDICAMENT? LA COURSE À PIED!

QUAND L'EXERCICE PHYSIQUE TRAITE LA SOUFFRANCE MENTALE AUSSI BIEN QUE LES ANTIDÉPRESSEURS.


Les troubles dépressifs et anxieux provoquent d'immenses souffrances en compromettant la santé mentale et physique. Ces souffrances expliquent le besoin de plus en plus pressant de stratégies thérapeutiques toujours plus efficaces, bien tolérées et aux effets adverses moindres. À coté de la psychothérapie, les médicaments antidépresseurs sont aujourd'hui considérés comme le traitement de première intention, à l'efficacité avérée pour une tolérance correcte. Malheureusement, les antidépresseurs ne sont pas toujours efficaces et sont souvent associés à des effets secondaires.

C'est pourquoi un traitement alternatif intéressant est aujourd'hui représenté par l'exercice.


Ainsi, pour des dépressions légères à modérées, la thérapie par l'exercice a des effets comparables à celui des médicaments.

Pour les dépressions plus sévères, si la psychothérapie associée aux antidépresseurs reste le traitement phare, l'exercice physique se présente comme une thérapie complémentaire précieuse.

Enfin, pour les personnes ne souffrant que de troubles anxieux (non dépressifs), l'exercice physique a montré une efficacité similaire à celle des traitements médicamenteux validés.

Bien que les antidépresseurs et les exercices physiques puissent avoir un impact comparable sur la santé mentale, leur impact sur la santé physique est encore mal étudié au sein des populations. Or, comprendre leur impact sur la santé physique est important pour plusieurs raisons:

- les personnes souffrant de troubles dépressifs et anxieux courent un risque accru de développer d'autres pathologies, telles que les maladies cardiovasculaires, le diabète ou l'obésité.

- ensuite, cela pourrait aider à découvrir les mécanismes par lesquels l'exercice physique exerce ses effets antidépresseurs ou anxiolytiques, puis identifier des patients présentant certains dérèglements biologiques, ce qui pourrait finalement aider à la prescription de traitements personnalisés.

C'est dans ce but qu'une équipe du Département de Psychiatrie de l'Institut Universitaire de Neurosciences d'Amsterdam a présenté une étude sur 4 mois [1] dans laquelle ont été examinés et comparés l'impact des médicaments antidépresseurs et de la course à pied, à la fois sur la santé mentale, mais également au plan physique, sur un échantillon de patients déprimés et/ou souffrant de troubles anxieux.

DÉROULÉ DE L'ÉTUDE.

Les chercheurs ont proposé à 141 patients souffrant d'anxiété et/ou de dépression le choix entre 16 semaines d'un antidépresseur inhibiteur sélectif de la recapture de la sérotonine (Escitalopram – SÉROPLEX®) ou bien d'une thérapie par l'exercice physique consistant en des séances de course à pied de 45 minutes en plein air et supervisées.

BARCELONE, 7 AU 10 OCTOBRE 2023.

Le Professeur Brenda Penninx qui a présenté ces travaux lors de la conférence ECNP à Barcelone début octobre, a déclaré:

"Cette étude a donné aux personnes anxieuses et déprimées un choix réel, un médicament ou un exercice.

Il est intéressant de noter que la majorité (96 sur 141) a opté pour l’exercice, ce qui a conduit à un plus grand nombre de participants dans le groupe course à pied que dans le groupe médicaments (45 sur 141).

Le traitement par antidépresseurs exigeait que les patients respectent la prise de médicaments prescrite, mais cela n'a généralement pas d'impact direct sur les comportements quotidiens.

En revanche, l’exercice s’attaque directement au mode de vie sédentaire que l’on retrouve souvent chez les patients souffrant de troubles dépressifs et anxieux en encourageant les personnes à sortir, à se fixer des objectifs personnels, à améliorer leur condition physique et à participer à une activité de groupe.

Le groupe antidépresseur a pris l’ISRS pendant 16 semaines.

Le groupe de course à pied visait deux à trois séances de groupe de 45 minutes par semaine, étroitement supervisées.

L'adhésion au protocole était plus faible dans le groupe course à pied (52%) que dans le groupe antidépresseurs (82%), malgré la préférence initiale pour la course plutôt que les antidépresseurs.

À la fin de l'essai, environ 44% des personnes des deux groupes ont montré une amélioration de la dépression et de l'anxiété.

Toutefois, le groupe de course à pied a également montré des améliorations du poids, du tour de taille, de la tension artérielle et de la fonction cardiaque.

Au contraire, le groupe antidépresseur a montré une tendance à la dépression et à l'anxiété, ainsi qu'une légère détérioration de ses marqueurs métaboliques."

"Les deux interventions ont aidé à lutter contre la dépression à peu près dans la même mesure. Les antidépresseurs avaient généralement un impact plus important sur le poids corporel, la variabilité de la fréquence cardiaque et la tension artérielle, tandis que la thérapie par la course à pied entraînait par exemple un effet amélioré sur la condition physique générale et la fréquence cardiaque."

"Il est important de dire qu’il y a de la place pour les deux thérapies dans la prise en charge de la dépression. L'étude montre que beaucoup de gens aiment l'idée de faire de l'exercice, mais cela peut être difficile à réaliser, même si les bénéfices sont importants."

"Nous avons constaté que la plupart des gens acceptent de prendre des antidépresseurs, alors que seulement la moitié du groupe de course à pied adhère à la thérapie par l'exercice deux fois par semaine: dire aux patients d’aller courir ne suffit pas!"

"Changer les comportements en matière d'activité physique nécessitera une supervision et des encouragements adéquats, comme nous l'avons fait en mettant en œuvre une thérapie par l'exercice dans un établissement de soins de santé mentale".

"Les antidépresseurs sont généralement sûrs et efficaces. Ils fonctionnent pour la plupart des gens, et nous savons que ne pas traiter la dépression entraîne de pires résultats. Néanmoins, nous devons étendre notre arsenal thérapeutique, car tous les patients ne répondent pas aux antidépresseurs ou ne sont pas disposés à les prendre."

"Nos résultats suggèrent que la mise en œuvre d’une thérapie par l’exercice est quelque chose que nous devrions prendre beaucoup plus au sérieux, car elle pourrait être un bon choix – et peut-être même meilleur – pour certains de nos patients."

"De plus, soyons également conscients des effets secondaires potentiels que nos traitements peuvent avoir, en dérégulant l’activité métabolique, en particulier chez les patients souffrant déjà de problèmes cardiaques."

"En fin de compte, les patients ne sont véritablement aidés que lorsque nous améliorons leur santé mentale sans aggraver inutilement leur santé physique."

QUELLES CONSÉQUENCES PRATIQUES À CETTE ÉTUDE?

Pour résumer, on peut isoler 3 grands types de conclusion:

1°/ des bénéfices mentaux égaux, mais des résultats physiques variés.

La course à pied et les antidépresseurs (ISRS) ont atténué de la même manière la dépression et l'anxiété, mais la course à pied a également amélioré la santé physique, contrairement aux ISRS, qui avaient au contraire tendance à altérer les marqueurs métaboliques.


2°/une nette préférence des patients pour l'exercice physique dans un premier temps.

La recherche a offert aux patients un véritable choix entre l'exercice et les médicaments, reflétant une approche réaliste des soins de santé mentale et révélant une préférence initiale pour la course à pied.


3°/ de grandes disparités dans l'observance des traitements.

Malgré une préférence initiale pour la course à pied, le taux d'acceptation était nettement inférieur (52%) par rapport au groupe antidépresseur (82%), ce qui indique les défis pratiques liés au maintien d'un programme d'exercice. Cela montre qu’il est plus difficile de changer une habitude de vie que de prendre une pilule.

En pratique, que peut-on proposer?

La thérapie par la course à pied consistait en des séances de course en plein air supervisées de 45 minutes, avec un objectif de deux à trois séances par semaine, ce qui correspond aux recommandations de santé publique des Centers for Disease Control and Prevention (CDC).

Les auteurs de l’étude reconnaissent que motiver les gens à continuer de faire de l’exercice n’est pas une tâche facile. Un changement de mode de vie, en particulier lorsqu'il s’agit de commencer à courir régulièrement, peut être particulièrement difficile pour les personnes déprimées, dont la santé mentale interfère fortement avec la motivation.

Pour être efficace, la thérapie par la course à pied doit aller au-delà du simple fait de dire à une personne "d'aller courir": il est essentiel de superviser et d'encadrer les personnes de manière adéquate.

Ensuite, la course à pied n'est peut-être pas pour tout le monde et les personnes déprimées peuvent certainement bénéficier des mêmes avantages en pratiquant d'autres activités qu'elles préfèrent, comme le vélo, la natation, le football ou encore le tennis. On peut tout aussi y associer certaines pratiques plus orientales telles que le Tai-Chi-Chuan, le Yoga, ou encore le Qi Gong [2][3]

Enfin, pratiquer une activité physique avec d’autres personnes, d'une part contribue de manière certaine à l'entretien de la motivation, et d'autre part constitue un élément de resocialisation fondamental chez des personnes souvent isolées.



L'exercice est la clé non seulement de la santé physique,

mais aussi de la tranquillité d'esprit.

Nelson MANDELA


Alain SUPPINI

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