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  • Photo du rédacteurAlain SUPPINI

LE MICROBIOTE INTESTINAL: 1ère partie.

QUELS SONT DONC CES MICRO-ORGANISMES QUI HABITENT CHEZ NOUS?

Le tractus gastro-intestinal (TGI) humain représente l'une des plus grandes interfaces (250 à 400 m2) entre l'hôte et son environnement. Au cours d'une vie, environ 60 tonnes de nourriture vont transiter par ce tractus, en même temps qu'une très grande quantité de micro-organismes (bactéries, parasites, champignons, virus) provenant de l'environnement. L'ensemble de ces micro-organismes, en colonisant le TGI, a co-évolué avec son hôte durant des milliers d'années pour former une relation complexe et mutuellement bénéfique: le microbiote intestinal.

On estime que notre tube digestif abrite pas moins de 10^13 micro-organismes, soit autant que le nombre de cellules qui constituent notre corps.

Le microbiote offre de nombreux avantages à l'hôte, tels que la formation ou la réparation de l'épithélium intestinal, la récolte d'énergie, la protection contre les agents pathogènes et la régulation de l'immunité. À l'inverse, ces mécanismes peuvent être perturbés en raison d’une altération de la composition microbienne, et on parle alors de dysbiose: le rôle du microbiote dans un grand nombre de maladies intestinales et extra-intestinales est ainsi devenu de plus en plus évident.


Dans cette première partie, nous verrons la composition et la physiologie du microbiote intestinal, puis dans une seconde partie, nous étudierons les maladies associées à la dysbiose et leurs différents traitements, et enfin une troisième partie sera consacrée à la préservation de l'équilibre du microbiote intestinal.


1- Composition et structure du microbiote gastro-intestinal humain.


À l’instar de l’empreinte digitale, le microbiote intestinal est propre à chaque individu: il est unique sur le plan qualitatif, mais également quantitatif. Parmi les 160 espèces de bactéries qui composent le microbiote, seule la moitié est communément retrouvée d’un individu à l’autre, avec cependant un socle commun de 15 à 20 espèces présentes chez tous les êtres humains.

Les virus sont aussi très nombreux au sein du microbiote: en infectant les populations bactériennes, ils peuvent en modifier le patrimoine génétique et l’expression de celui-ci.

Enfin, le microbiote fongique qui regroupe levures et champignons, constitue le 3è pan de la physiopathologie du microbiote intestinal.


2- Développement du microbiote gastro-intestinal humain.


On pense généralement que le développement du microbiote commence dès la naissance: le TGI est rapidement colonisé, volontiers modifié par les différents événements de la vie tels qu'une maladie, un traitement antibiotique, ou encore des changements de régime alimentaire.

Au cours de la première année de vie, la diversité microbienne augmente, mais la composition du microbiote conserve encore un profil distinct de celui d'un adulte.

Ce n'est que vers 2 ans et demi que la composition, la diversité et les capacités fonctionnelles du microbiote de l'enfant ressemblent à celles du microbiote adulte.

À l'âge adulte, la composition du microbiote sera relativement stable, bien que sujette à des perturbations induites par les événements de la vie.

À partir de 65 ans, le microbiote a tendance à diminuer, sa diversité est de plus en plus réduite, de même que sa capacité à effectuer des processus métaboliques, expliquant le mécanisme de vieillissement inflammatoire de l'intestin des personnes âgées.


3- "Biogéographie" du microbiote humain dans le tractus gastro-intestinal.


La composition du microbiote reflète les propriétés physiologiques d'une région donnée (estomac, intestin grêle, colon, rectum) et elle est stratifiée non seulement sur l'axe transversal estomac-rectum, mais également sur la profondeur de chacun des organes.


4- Facteurs façonnant le microbiote gastro-intestinal.


La composition du microbiote est soumise à des pressions sélectives de l’hôte et de son environnement.

Les recherches actuelles suggèrent que l'alimentation exerce un effet important sur le microbiote intestinal: ainsi le microbiote de la partie terminale de l'intestin grêle (iléon) reflète sa capacité à métaboliser les sucres simples, alors que la formation du microbiote colique dépend des glucides présents dans les fibres alimentaires.

Les régimes alimentaires extrêmes, par exemple n'apportant que de la viande, ou au contraire uniquement des végétaux, entraînent des altérations de grande envergure du microbiote intestinal [1].

À l'inverse, l'influence des fibres a été démontrée par des études montrant que les régimes alimentaires riches en cellulose et amidon résistant entraînaient un enrichissement fort et reproductible de nombreuses espèces bactériennes de l'intestin [2].

Chez les nourrissons allaités au sein, le microbiote est généralement élevé [3], alors celui-ci est réduit chez les nourrissons nourris au lait maternisé [4]. En outre, le microbiote de ces derniers présente une plus grande diversité.

Le microbiote des nourrissons sous-alimentés est immature, dysbiotique et contient un plus grand nombre "d'entéropathogènes", susceptibles de déclencher des maladies intestinales. Pour exemple, les nourrissons d'Afrique rurale, avec une alimentation dominée par l'amidon, les fibres et les sucres complexes d'origine végétale, ont un microbiote pouvant héberger jusqu'à 70% de bactéries bénéfiques, alors que chez les enfants européens, dont l'alimentation est riche en sucres simples et protéines animales, l'abondance de ces bactéries est d'au maximum 20% [5]. On retrouve exactement la même tendance négative chez les individus en bonne santé consommant de grandes quantités de glucides simples [6].

Enfin nombreux sont les facteurs environnementaux impliqués dans la formation du microbiote: situation géographique, chirurgie, tabagisme, dépression, ou encore les conditions de vie urbaines ou rurales.

Parmi les médicaments, les traitements antibiotiques perturbent considérablement l’équilibre microbien à court et à long terme, en diminuant à la fois la richesse et de la diversité de la flore [7][8][9].


5- Le rôle du microbiote gastro-intestinal dans la santé.


Certains des rôles les plus importants de ces microbes consistent à aider à maintenir l’intégrité de la barrière muqueuse, à fournir des nutriments tels que des vitamines, à protéger contre les agents pathogènes, ou encore à réguler le système immunitaire et la réponse inflammatoire.

Dans le détail, le microbiote possède des propriétés anti-inflammatoires et anticancéreuses [10][11].

Il participe aussi au "nettoyage" des cellules vieillissantes de la lumière intestinale [12]: il intervient dans le renouvellement cellulaire et de la cicatrisation des plaies intestinales [13][14], de même que dans le renouvellement du mucus intestinal [15].

Il permet de réguler et de stabiliser la métabolisation du glucose et des lipides au niveau du foie [16].

Il permet de moduler la régulation de l'appétit et l'apport énergétique [17], en atténuant en particulier les comportements alimentaires fondés sur la récompense [18].

Tous ces facteurs influenceront la santé de l’hôte: on sait par exemple qu'une altération du microbiote est associée au développement de maladies métaboliques telles que l'obésité et le diabète de type 2 [19].

Le microbiote gastro-intestinal est également crucial pour la synthèse de vitamines essentielles que l'hôte est incapable de produire [20]: les bactéries du microbiote sont des organismes clés dans la production de vitamine B12, qui ne peut être synthétisée ni par les animaux, ni par les plantes, ni par les champignons. D'autres vitamines, dont il a été démontré que le microbiote intestinal les synthétise chez l'homme, comprennent la vitamine K, la riboflavine, la biotine, l'acide nicotinique, l'acide panthoténique, la pyridoxine et la thiamine [21].



Alain SUPPINI


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